En 2014, un
manuscrit inconnu contenant une vie de François d’Assise, datant des années
1230, était identifié. Cette découverte exceptionnelle permet d’en savoir un
peu plus sur le Poverello.
Saint
Francois d’Assise recevant l’approbation de la première règle de l’ordre par le
pape Innocent III. Détail d’une fresque de Giotto di Bondone (1297-1299),
basilique Saint-François, à Assise. Leemage
·
• La Vie retrouvée de François d’Assise,
Texte
présenté et traduit par Jacques Dalarun, CNRS Éditions, 142 p., 10 €
CNRS
editions
C’est un
tout petit recueil (120 x 82 mm), mal relié, sans couverture, abîmé, mais
une découverte comme il y en a peu dans le monde de la recherche. En 2014,
grâce à l’aide d’un ami américain, Jacques Dalarun, médiéviste et spécialiste
des sources franciscaines, identifiait une vie jusqu’ici inconnue de saint
François d’Assise (1181/2-1226) et en permettait l’acquisition par la
Bibliothèque nationale de France.
Sur ce saint,
objet d’admiration et canonisé en 1228, à peine deux ans après sa mort, les
sources ne manquaient pas. On connaissait la Vita prima (1229) et la Vita
Secunda (1246-1247) rédigées par le frère Thomas de Celano, qui fut son
contemporain, premières biographies parmi les dizaines consacrées à François à
l’époque médiévale. La Vie de notre bienheureux père François, qui vient
d’être découverte, est aussi de la main de Thomas de Celano et sa rédaction se
situe dans les années 1230, entre la Vita prima et la Vita secunda.
« Elle
est, dans l’absolu, la deuxième légende en prose jamais écrite sur François
d’Assise et la première jamais écrite pour l’usage spécifique des Frères
mineurs », précise Jacques Dalarun.
Un croyant
simple et radical
Par son
existence même et les détails qu’elle livre, cette Vie éclaire de manière
nouvelle le personnage de François. Écrite avec beaucoup de simplicité et une
pudique admiration, elle offre un témoignage poignant sur cet homme qui, au fil
des siècles, n’a cessé d’intriguer au-delà de toutes les frontières,
linguistiques, confessionnelles, religieuses, culturelles…
On y
redécouvre François, jeune homme au tempérament généreux dès avant sa
conversion. « Il était riche, pas avare mais prodigue ; il n’accumulait pas
l’argent, mais le dissipait très vainement » (§2), note Thomas de Celano,
qui décrit ensuite un homme saisi par l’amour du Christ : « Soudain, il fut
changé en un autre homme et renonça à ce dont il avait l’habitude de se
réjouir. » (§3)
Sous sa
plume, François apparaît comme un croyant simple et radical – « Il
fuyait l’admiration de toutes les manières possibles pour ne pas encourir la
vanité » (§34) – et un homme de réconfort : « À peine un si grand
trouble de l’esprit pouvait-il affecter quelqu’un qu’à sa parole enflammée,
tout nuage ne s’éloigne et que la sérénité ne revienne » (§22).
Le mystère
de François d’Assise
Sur la
pauvreté radicale, vécue et prêchée par François, cette biographie est aussi
éclairante. Elle en rappelle le caractère primordial et livre même un détail
jusqu’ici inconnu. Il a trait au vêtement de François dicté par son souci de se
conformer « en tout aux pauvres » : une tunique reprisée « non pas
avec des fils, mais avec des écorces d’arbres ou de plantes » (§ 60).
Pour Jacques
Dalarun, ce genre de précision n’a pas surgi par hasard sous la plume de Thomas
de Celano. Dans un ordre naissant qui se déchire sur la question de la
pauvreté, le franciscain entend ainsi rappeler à tous les frères « que la
pauvreté franciscaine n’est pas une posture spirituelle ou une figure
symbolique », souligne l’historien.
Grâce à
cette Vie retrouvée, le puzzle recomposant le visage de François gagne
en précision, mais il ne perd pas son mystère. Le travail sans fin des
relectures se trouve au contraire relancé, pour le plus grand bonheur des
historiens et des amis du poverello.
Élodie
Maurot,
La Croix le
16/10/2019 à 17:14
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